Un conte africain : Ngano et les fous du Royaume (Madagascar)

Posté sur3 années auparavant

Il était une fois, à Madagascar, un roi, qui s’appelait Andrianampoinimerina. Le roi s’ennuyait dans son grand château. Il était las d’entendre complimenter sa beauté, sa force et son intelligence. 

Il était une fois, à Madagascar, un roi, qui s’appelait Andrianampoinimerina.

Le roi s’ennuyait dans son grand château. Il était las d’entendre complimenter sa beauté, sa force et son intelligence.  
Un jour, on vanta devant lui un garçon du nom de Ngano qui, dès le plus jeune âge, s’était montré adroit et futé. Et l’on citait mille tours qu’il avait joués à son père et à sa mère.
Le roi fit appeler Faralahy, le père, et Fanavary, la mère, et leur demanda de lui amener l’enfant, qu’il désirait garder auprès de lui. Comme ses désirs étaient des ordres, ils se dépêchèrent de revenir avec le jeune garçon. Sa mine éveillée plut aussitôt au roi.

Un matin, le Roi dit à Ngano d’aller lui chercher une bouteille d’eau à la source, et aussi de lui rapporter un miroir qu’il avait oublié dehors.

Ngano se hâta et courut si vite, qu’en arrivant à la case royale, il trébucha sur une grosse pierre qui formait l’une des marches de l’escalier à l’entrée. La bouteille se cassa, et le miroir se brisa en mille morceaux.

Mais le Roi se garda bien de gronder et lui demanda tranquillement de reconstituer ces objets auxquels il tenait.
- Ce sera très facile, lui dit Ngano, si tu me procures une corde de fumée et un bol de larmes.

Les ruses de Ngano

Amusé, et intrigué, le Roi décida de relever le pari. Il se fit apporter des piments, un bol et un pilon et il écrasa les piments jusqu’à en obtenir une fine poudre, qu’il mélangea à de la crème afin d’en faire une pommade. Il appela alors sa fille qui était fort coquette et lui affirma qu’on venait de lui procurer un onguent extraordinaire, qui donnait les plus beaux yeux du monde. Elle s’en frotta aussitôt les paupières et, bien entendu, quelques larmes commencèrent à couler. Le roi se précipita pour les recueillir, mais la belle avait le cœur si sec que sa provision de larmes fut vite tarie et le fond du bol à peine
humide.

Le Roi s’allongea alors sur sa natte et se fit recouvrir de son lamba. Puis il dit à Ngano d’aller chercher la Reine et de lui annoncer que le Roi venait de mourir subitement.
La reine déclara, tranquillement :
- Hazo raike tsy mba mete ho ala - un seul arbre ne fait pas la forêt.
Ce qui, évidemment, voulait dire aussi qu’elle saurait choisir un autre arbre dans la forêt.

Mais le Roi, bon joueur, ne se formalisa pas pour si peu. Il se releva et ne songea qu’à tenter d’autres expériences. Il se fit apporter du bois vert et en garnit le foyer, puis il y mit le feu. Un lourd nuage de fumée emplit la pièce. Le Roi essaya de s’en saisir et de la tordre pour en faire une corde, mais bien entendu, il n’y parvint pas.
- Tu t’es moqué de moi, dit-il à Ngano en riant, ce que tu m’as demandé est proprement impossible !
- Mais bien sûr, déclara Ngano. Toi-même, tu m’avais demandé l’impossible. A malin, malin et demi !

Le Roi fut enchanté de cette histoire et il en rit pendant deux jours. Puis il eut envie de jouer un bon tour à Ngano. Il rassembla quelques personnes autour de lui et annonça au jeune garçon  :
- Tu vas assister à une chose étonnante que ces gens sont capables de faire ; alors que toi, tu ne le pourras pas, quoique, je le reconnais, tu sois très malin. Ces gens que tu vois ici, crois-moi si tu veux, vont pondre un œuf.
Et en effet, les uns après les autres, les hommes défilèrent. Et des œufs, qu’ils avaient dissimulés chacun sous leur lamba, roulèrent à terre chaque fois qu’ils passaient devant le Roi.
- A ton tour maintenant, dit le Roi.

L’arroseur arrosé


Ngano, sans s’émouvoir autrement, s’arrêta devant le Roi et se mit à agiter les bras comme des ailes et il poussa un cocorico retentissant.
- Que fais-tu ? s’étonna le Roi.
- Tu vois, je suis un coq… Tout le monde sait bien que les coqs ne pondent pas.
Le roi dut admettre qu’encore une fois, c’était Ngano le plus malin. Il en rit de bon coeur, mais ne s’en tint pas vaincu pour autant.

Ainsi donc, après quelques jours de réflexion, le Roi demanda à Ngano :
- Je voudrais que tu me trouves quatre fous.

Ngano partit à la recherche des quatre fous que demandait le Roi. Il rencontra d’abord le sorcier du village. Celui-ci était accroupi devant sa natte en fibre de manarana, sur laquelle il avait répandu des graines sacrées. Il les remuait du bout des doigts et soufflait sur elles pour les réveiller. En vérité, il consultait le sort en murmurant des paroles rituelles.
- Que cherches-tu à savoir ? demanda Ngano.
- Je voudrais savoir si ma femme est vraiment morte.
- Ne le sais-tu pas ? Elle est morte et enterrée depuis quatre ans.
- Oui mais les graines qui la représentent affirment qu’elle est en vie.
A ce moment, un homme monté sur un cheval passa près d’eux. Le cavalier portait un énorme fagot de bois sur l’épaule et il était à moitié courbé sous la charge.
- Mais pourquoi ne poses-tu pas ce bois sur ton cheval ? demanda Ngano.
- C’est facile à comprendre, fit l’homme, et tu n’es vraiment pas bien malin de ne pas l’avoir deviné. Tu ne vois pas que mon cheval est fatigué ? Il a déjà fait une grande course et c’est pour le soulager que je porte ce chargement moi-même.
- Eh bien, pensa Ngano, je n’ai pas besoin d’aller plus loin, ceux-là sont vraiment fous. Et sans attendre, il emmena le sorcier et le cavalier chez le Roi.

Le roi fut bien surpris de le voir revenir si tôt, et si peu accompagné.
- Tu es déjà là ? demanda le Roi. Et mes fous ? Où donc sont-ils ?
- Je les ai trouvés tous les quatre, répondit Ngano. Toi, moi, et ces deux hommes.

Devant tant de sagesse et de ruse, le roi hocha la tête. Depuis lors, Ngano est conseiller du roi, et le royaume est gouverné par quatre fous.

Étiquette: conte, africain, madagascar
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